Suite à une nouvelle épidémie de rougeole survenue dans la zone de santé d’Ingende, en Equateur, Médecins Sans Frontières (MSF) a mis en œuvre-en collaboration avec les autorités sanitaires une réponse d’urgence axée sur la prise en charge et la vaccination des enfants ciblés.
Ce n’est pas la première fois que la zone de santé d’Ingende est en proie à une épidémie de rougeole. Suite à une explosion de cas survenue l’année passée, les autorités sanitaires y avaient, en septembre 2023, organisé une campagne de vaccination dans le cadre des AVS (Activités Vaccinales Supplémentaires). Mais celle-ci n’avait permis d’atteindre que 80% des enfants, un pourcentage bien trop faible pour stopper la propagation de ce virus, parmi les plus contagieux au monde puisqu’une personne infectée peut contaminer jusqu’à 90% des personnes non vaccinées autour d’elle.
Un défi logistique et humain
Les problèmes dans l’organisation de cette campagne, associés à l’enclavement de certaines aires de santé ont alimenté la résurgence des cas, à nouveau à la hausse en 2024. C’est dans ce contexte que MSF a décidé d’appuyer le ministère de la Santé pour assurer une couverture vaccinale optimale tout en soutenant la prise en charge des malades à l’hôpital général de référence (HGR), à l’Hôpital de la Plantation et Huilerie du Congo (PHC) de Boteka et dans quatre autres centres de santé.
« Atteindre les coins reculés en pleine forêt équatoriale est un vrai défi logistique, mais il est essentiel d’y parvenir pour réussir les campagnes de vaccination », explique Jean Jacques Stéphane Nfon Dibie, Coordonnateur de l’équipe d’urgence de MSF pour la zone Ouest de la RDC. « La zone compte 18 aires de santé, et plus de la moitié sont difficilement accessibles. Les autorités sanitaires locales n’ont pas les moyens logistiques permettant de ‘ratisser’ toutes les aires de santé. Acheminer les vaccins à pied n’est pas souvent possible car les vaccins doivent être maintenus réfrigérés. Nous avons donc déployé des dizaines des motos et des pirogues motorisées afin d’atteindre toutes les aires de santé. »
Outre les moyens logistiques, l’équipe d’urgence de MSF a également été attentive à un facteur humain essentiel : l’implication active des peuples autochtones habitant les coins les plus reculés et ayant parfois été insuffisamment engagés dans les réponses vaccinales précédentes.
« Cette situation avait généré, dans certaines communautés, de la frustration voire de la méfiance face aux campagnes sanitaires » explique le Dr Thomas Holebanga, responsable d’Intervention MSF à Ingende. « Or, face à la rougeole, personne ne doit rester sur le côté, au risque de voir le virus continuer de se répandre. S’assurer que chacune des communautés soit pleinement sensibilisée et engagée dans la prise en charge et la vaccination était une priorité absolue. Et cela s’est révélé payant : au cours de notre intervention, toutes les communautés ont démontré une très bonne adhésion et la réussite a été au rendez-vous. »
Organisée en deux phases du 24 avril au 13 mai, la campagne de vaccination rougeole de MSF a permis de protéger 62.645 enfants de six mois à neuf ans dans les 18 aires de santé que compte la zone – soit une couverture de quasiment 100%. En outre, 11.740 enfants ont été vaccinés contre la diphtérie, tétanos, coqueluche, hépatite B, l’Hæmophilus influenzae de type b et le pneumocoque, par l’administration de vaccins pentavalent et PCV13.
Les équipes de MSF ont également appuyé, du 3 avril au 21 mai, la prise en charge de 649 enfants atteints de la rougeole, ainsi que plus de 1.000 enfants souffrant du paludisme ou de malnutrition aiguë sévère. MSF a aussi réhabilité le forage de l’HGR d’Ingende, à l’arrêt depuis plus de 6 mois. Après cette réhabilitation, 20.000 litres d’eau potable ont été distribués par jour pour le fonctionnement de l’HGR et les besoins de la communauté.
« face à la rougeole, personne ne doit rester sur le côté, au risque de voir le virus continuer de se répandre. S’assurer que chacune des communautés soit pleinement sensibilisée et engagée dans la prise en charge et la vaccination était une priorité absolue. Et cela s’est révélé payant : au cours de notre intervention, toutes les communautés ont démontré une très bonne adhésion et la réussite a été au rendez-vous. »Dr Thomas Holebanga, responsable d’Intervention MSF à Ingende
Améliorer la réponse aux épidémies de rougeole s’impose
Depuis des années, les épidémies de rougeole se succèdent sans fin en RDC avec une létalité élevée, du fait des insuffisances liées à la mise en œuvre de la vaccination de routine et des activités de vaccination supplémentaires (AVS).
En 2023, plus de 300.000 cas de rougeole ont été enregistrés dans le pays, entraînant près de 6.000 décès.
« La situation sécuritaire et humanitaire difficile en RDC, particulièrement à l’Est, ne doit pas nous faire oublier la nécessité absolue de lutter plus efficacement contre ce tueur de masse silencieux que représente encore la rougeole », déclare Jean Jacques Stéphane Nfon Dibie. « Loin des caméras, les ripostes d’urgence contre la rougeole continuent de représenter la grande majorité des réponses d’urgence de MSF dans le pays. Il est crucial que toutes les énergies disponibles soient mobilisées pour renforcer l’ensemble des piliers de la réponse à ce virus, de la vaccination de routine aux campagnes AVS. C’est un combat difficile, de chaque instant, mais un combat crucial pour sauver des milliers d’enfants. »
En 2023, les équipes MSF ont été mobilisées pour répondre aux différentes épidémies de rougeole à travers le pays. 1 654 640 enfants ont été vaccinés contre cette maladie et 46 348 patients ont été pris en charge.