Des dizaines de milliers de personnes se sont déplacées à Angumu suite aux violences dans les régions voisines, et ont trouvé refuge à la périphérie des villages et le long des routes. Dans ce contexte où le paludisme est endémique et les conditions de vie précaires, la prévention est un enjeu crucial. En plus des services curatifs dans les centres de santé, MSF mène depuis le début de l'intervention, des activités préventives à grande échelle, telles que l'administration massive de médicaments qui consiste à distribuer les antipaludéens à la population, la pulvérisation intra domiciliaire résiduelle.
Cela se fait par la pulvérisation de l'insecticide dans les maisons et les abris, ainsi que la distribution de moustiquaires. Les relais communautaires (RECO) jouent également un rôle important dans la prévention du paludisme et d'autres maladies. Pascal vit dans le site de déplacés d'Ugudo Zii et a été élu par sa communauté pour servir de RECO :
"Je fais du porte à porte et je montre aux gens les bonnes pratiques qui peuvent aider à prévenir les maladies. Beaucoup de problèmes proviennent d'un mauvais stockage de l'eau, qui devient un lieu de prolifération des moustiques ou de contaminations pouvant entrainer diarrhées et autres problèmes de santé. Nous organisations également des séances collectives de prévention sur la vaccination, le familial et les critères d'admission dans les centres de santé. Je suis fier de ce que je fais et ma communauté l'apprécie. De bonnes pratiques d'hygiène et des connaissances adéquates font une grande différence".
Les RECO sont soutenus par les promoteurs de santé de MSF, qui les forment et les accompagnent dans leur travail:
Selon Frédéric Manantsoa, cette approche permet également à MSF de mener une surveillance épidémiologique au niveau communautaire.
"Cet aspect, nous permet de disposer d’une surveillance et d’un système d’alerte précoce afin de pouvoir agir à temps pour prévenir les épidémies et autres urgences, ou du moins minimiser autant que possible la nécessité d’intervenir. De cette manière, nous réduisons considérablement le nombre de cas sévères dans les hôpitaux".
Apporter un soutien aux structures de santé
Au niveau des centres de santé et de l'hôpital régional général d'Angumu, les équipes MSF représentent environ 35% du personnel et donnent la priorité aux soins des enfants de 0 à 15 ans, au traitement du paludisme pour tous les groupes d'âge, aux services de santé mentale, aux services de santé reproductive, y compris le planning familial, et la gestion des cas de malnutrition.
Pour aider les populations à atteindre les structures de santé, MSF a mis en place un système de référence utilisant des motos et des ambulances pour transporter rapidement les patients des sites de santé communautaires vers les centres de santé ou l'hôpital, en fonction de la gravité et du type de traitement nécessaire.
Enfin, MSF apporte son soutien aux survivants de violences sexuelles en coopération avec les comités de protection présents sur chaque site de déplacés.
Virginie a fui le conflit dans la région de Musongwa et est arrivée à Ugudo Zii il y a sept mois. Elle est membre du comité de protection du site de déplacés :
"Dans un contexte de déplacements massifs avec une forte densité de personnes, les femmes sont très vulnérables et les épisodes de violences sexuelles sont fréquents. Nous travaillons en étroite collaboration avec les RECOs, et ensemble nous orientons les survivants vers les RECOSITEs, qui à leur tour contactent MSF pour que la personne puisse recevoir des soins médicaux et un soutien en santé mentale. Nous garantissons une confidentialité maximum, ce qui est très important pour protéger les victimes du risque de stigmatisation dans leur communauté".
Engagement communautaire à tous les niveaux
Le travail avec la communauté ne se limite pas aux activités de sensibilisation et à la gestion des cas de paludisme, de diarrhée et de malnutrition. Elle implique également la construction de structures telles que des sites de santé communautaire, des latrines et des puits, l'organisation de distributions d'articles essentiels comme le savon, les moustiquaires imprégnées d’insecticide et la gestion des médicaments dans les sites de santé communautaire.
Abdurakhman Bodian,responsable de la promotion de la santé pour MSF à Angumu ,a été témoin des changements induits par cette approche :
"Lorsque nous avons commencé l'intervention, MSF faisait tout, jusqu’au transport de l'eau. Ce n'était pas viable, d'autant plus qu'il y a très peu d'autres organisations qui travaillent à Angumu. Aujourd'hui, nous avons réussi à responsabiliser la communauté et nous sommes arrivés au point où toutes les constructions et autres efforts logistiques sont réalisés en coopération avec elle. MSF fournit le matériel nécessaire et la communauté fait le reste. L'approche est inclusive dès le départ, de la construction à la gestion des sites de santé. Nous avons trouvé ici une communauté très engagée et organisée, ce qui a facilité les choses".
MSF s'efforce désormais de renforcer la résilience de la population et de la rendre de plus en plus autonome en matière de gestion de la santé et de tous les aspects de santé. Les nombreux comités présents dans les différents sites de déplacés représentent une bonne opportunité pour MSF de déléguer certains aspects de l'intervention et d'augmenter le niveau d'autonomisation de la communauté.
"Nous devons analyser le potentiel de la communauté afin de leur déléguer des activités tout en les accompagnant. En décentralisant un maximum d'activités, nous augmentons les chances que les mécanismes perdurent lorsque la présence de MSF se réduit ."
Des résultats encourageants
Frédéric Manantsoa est satisfait des résultats obtenus jusqu'à présent :
"Quand on regarde la première collecte de données que nous avons faite au début sur les taux de mortalité dans la région d'Angumu et qu'on la compare aux plus récentes, on voit une vraie différence. Sans ce système, la situation n'aurait pas changé. La collaboration entre MSF, le ministère de la Santé et la communauté est devenue étroite et stable. Je pense que ce type de projet a un avenir. Nous devons le développer et capitaliser sur tout ce que nous avons appris car je pense que c'est l'une des meilleures approches pour le contexte spécifique qu’est la RDC. Nous devons nous rappeler qu'environ 80% de la population vit dans des zones rurales avec un accès très limité aux soins de santé. Par conséquent, ce type d'approche communautaire pourrait être r une solution à reproduire r et approfondir."