A seulement trois ans et cinq mois, Kahindo semble déjà vieux, son visage aminci est ridé. « Nous sommes arrivés à l’hôpital il y a huit jours : mon fils vomissait sans relâche. Souffrant de fortes fièvres et de diarrhée, il avait perdu tout appétit », explique Solange, la mère de Kahindo. « Mon premier enfant est mort de la même maladie, il ne me reste que celui-ci. »
Dans cette salle d’hospitalisation, Mwayuma, une petite fille de deux ans, se réveille de sa léthargie après neuf jours de traitement, à la grande satisfaction du personnel médical.
« Mwayuma est arrivée dans un état critique, avec une déshydratation sévère associée à des infections.»
Potentiellement mortelle, la malnutrition aiguë sévère avec complications médicales peut engager le pronostic vital des petits patients.
« En général, ce sont des enfants de moins de cinq ans que nous recevons chaque jour et la plupart d'entre eux sont « marasmiques ». Cela est dû principalement à une mauvaise et pas assez d’alimentation de la mère et de l’enfant. Le lait maternel n’est pas suffisant comme source d’énergie pour l’enfant après l’âge de 6 mois, et leur environnement socio-économique ne leur permet pas d’acheter assez de nourriture de qualité en termes de protéines énergie et micronutriments de respecter les règles d'hygiène les plus basiques », explique Jean-Marie.
L’unité nutritionnelle de l’HGR de Nyamilima reçoit en moyenne trois à quatre enfants par jour ; 90 patients ont reçu des soins au cours des mois de juin et juillet 2021.
Des taux de mortalité en nette diminution
Dans cette zone de santé de la province du Nord-Kivu, les équipes MSF en collaboration avec le Ministère de la Santé font face à deux urgences simultanées : malnutrition et paludisme, une combinaison parfois mortelle pour les enfants de moins de cinq ans, parmi les plus vulnérables.
En effet, la malnutrition engendre une immuno-dépression relative. Les enfants sont confrontés à un risque plus important de développer un paludisme compliqué et perdent toute envie de se battre contre les maladies. Ainsi, un enfant malnutri aura deux fois plus de risques de décéder qu'un enfant présentant un statut nutritionnel normal. De plus, le paludisme provoque souvent une perte de poids chez les enfants, les exposant ainsi à un risque accru de malnutrition.
Dans la zone de santé de Binza, les enfants malnutris qui développent une forme grave de paludisme sont soignés pour les deux maladies, la malnutrition, avec des aliments thérapeutiques prêts à l'emploi et le paludisme. Dès leur arrivée au centre de santé de Camp 5heures, soutenu par MSF, les enfants sont dépistés et pris en charge gratuitement. S'il s'agit d'un cas de paludisme simple, l'enfant est renvoyé à son domicile avec son traitement. En cas de paludisme compliqué ou lors de complications comme une anémie ou une insuffisance respiratoire, l'enfant est référé à l’HGR de Nyamilima.
Deux des trois enfants de Mahindo sont soignés en ambulatoire pour un paludisme grave.
« Quand je suis revenue, une semaine après, les enfants étaient malades. Ils ont reçu un traitement approprié et gratuit au centre de santé. »
Depuis plusieurs années, la zone de santé de Binza enregistre des taux élevés de paludisme, plus de 3 000 cas au cours du seul mois de juin 2021. En juillet de cette année, le centre de santé Camp 5heures a accueilli entre 20 et 30 patients par jour.
« Les raisons d'une telle prévalence sont liées à l'environnement dans lequel vivent ces populations mais aussi, à leur niveau de vie», explique Alphonse, l'infirmier titulaire adjoint du centre de santé.
« D’un côté, il y a le parc de Virunga, de l’autre le lac Edouard et la rivière Ishasha : les moustiques apprécient ce contexte de forêts et de marécages. Les gens sont tellement pauvres ici qu’ils ne sont pas en mesure de respecter toutes les mesures d'hygiène indispensables pour maintenir leurs enfants en bonne santé. »
C’est depuis le début du mois de février 2021, que MSF appuie les trois structures de santé de cette zone, l’HGR et les centres de santé de Kiseguru et Camp 5heures, le taux de mortalité a considérablement baissé, constate Alphonse. Il précise qu’aucun décès n’a été enregistré au mois de juillet, contre quatre à cinq par semaine à la même époque l’année dernière. Désormais, « dès que les gens tombent malades, ils viennent consulter rapidement auprès de la structure sanitaire », dit-il.
Outre la prise en charge de la MAS et du paludisme, MSF collabore avec le Ministère de la Santé en prenant en charge gratuitement les enfants âgés d’un mois à 15 ans (toutes pathologies confondues) ainsi que les victimes de violences sexuelles. Appuyé par notre équipe médicale, le service des urgences de l’HG stabilise les patients, les prend en charge et les réfère à l’hôpital de Rutshuru si une chirurgie est nécessaire.