Au cours des dernières semaines, des milliers de personnes fuyant le conflit au Soudan ont trouvé refuge dans le nord de la République centrafricaine (RCA). Issa Moussa, chef de mission adjoint pour MSF, est responsable de l’intervention menée par l’équipe d’urgence pour soutenir les réfugiés. Il explique la situation sur place.
Quelle est la situation dans le nord de la RCA ?
On compte plus de 13 800 personnes qui sont arrivées depuis fin avril au point de transit d’Am Dafok, dans la préfecture de Vakaga au niveau de la frontière avec le Soudan. Ce sont tous des gens qui fuient le conflit au Soudan, la plupart sont Soudanais mais d’autres sont des Centrafricains qui avaient rejoint le Soudan au moment des crises de 2019 et 2021 et qui décident de rentrer.
Ils se sont d’abord installés dans un premier camp à Am Dafok, mais la semaine dernière, le gouvernement centrafricain a décidé de relocaliser les réfugiés pour des raisons de sécurité vers la ville de Birao, à 65 km. Donc des convois par bus sont organisés tous les deux jours pour déplacer les personnes au fur et à mesure. L’objectif initial est de transporter 4 000 personnes par semaine, mais on réalise déjà qu’il faudra plus de temps. Au 7 juin, ils n’étaient que 300 à avoir été transférés.
Les réfugiés ont manifesté une certaine résistance vis-à-vis de cette décision car ils ne voulaient pas s’éloigner davantage de la frontière et surtout ils redoutaient que les conditions de vie à Birao soient plus difficiles. Après discussion, et suite aux premiers convois – essentiellement constitués d’hommes venus s’assurer des conditions du nouveau camp – les réfugiés acceptent de mieux en mieux la décision. Sur le plan logistique et sécuritaire, Birao est une localisation plus simple pour les acteurs humanitaires car l’accès par avion est possible, la ville est moins isolée et la situation y est plus stable.
Quelles sont les conditions de vie des réfugiés ?
La majorité des réfugiés sont des femmes et des enfants car beaucoup d‘hommes sont restés derrière pour combattre. Ils sont venus par camion, charrette ou même à pied. Une maman nous expliquait qu’elle a fait le chemin avec ses enfants depuis Karthoum, la capitale du Soudan ; la famille a mis plus de deux semaines à parcourir les 1 000 km de distance.
Evidemment, ils arrivent tous épuisés du Soudan et beaucoup d’enfants sont malades à cause des conditions difficiles. Dans nos consultations, nous avons déjà noté plusieurs cas de malnutrition sévère. Dans le camp de transit d’Am Dafok, ils sont tous accueillis dans de grands hangars communautaires, où différents acteurs essayent d’apporter leur soutien. Quelques latrines ont été construites et il y a des distributions d’eau et de nourriture régulières. A Birao, des logements familiaux sont en train d’être construits pour proposer de meilleures conditions de vie aux réfugiés.
Que fait MSF pour leur venir en aide ?
Nous continuons à surveiller la situation humanitaire à Am Dafok, car c'est le principal point d'entrée des réfugiés et ils ont besoin d'aide dans cette zone, mais notre intervention se concentre sur le nouveau site établi à Birao. Pendant les premiers jours du processus de relocalisation, MSF s'est engagée à assurer des soins médicaux pour tous les groupes d'âge et à fournir un soutien en termes d'eau, avec des distributions quotidiennes, en attendant que d'autres acteurs prennent en charge certaines de ces tâches. Nous avons construit un poste de santé temporaire et fournissons des soins pédiatriques et des vaccinations.
Nous sommes également présents au sein de l’hôpital local pour assurer la continuité des soins primaires que nous proposons au niveau du site des réfugiés. Là-bas, nous allons gérer la pédiatrie pour les enfants et les jeunes jusqu’à 15 ans, les soins nutritionnels intensifs, les urgences médico-chirurgicales et les cas de violence sexuelles avec un soutien psychosocial.
Enfin, nous allons appuyer le laboratoire pour améliorer la sécurité des transfusions sanguines en fournissant du matériel médical et en formant les équipes. Compte tenu de la grande souffrance vécue par certains réfugiés, offrir un soutien en santé mentale sera également crucial. Comme le reste du pays, la Vakaga est une préfecture qui a des besoins médicaux immenses, donc nous allons évidemment aussi apporter notre soutien aux habitants de la région.