En 2016, en l’absence d’une voie de sortie sûre et légale pour les demandeurs d’asile et autres migrants qui transitent par la Libye ou la fuient, au moins 4 579* hommes, femmes et enfants ont perdu la vie en risquant le tout pour le tout pour atteindre l’Europe.
Selon le HCR, quelque 181 436 personnes ont atteint la relative sécurité des côtes italiennes. Mais chacun avait son lot d’épreuves et de souffrances à raconter. Seize pour cent des migrants arrivés en Italie étaient des enfants et des adolescents de moins de 18 ans et 88% d’entre eux étaient non accompagnés.
Pour les 21 603 migrants sauvés par les équipes de MSF, l’odyssée avait débuté dans des pays aussi divers que le Bangladesh et le Nigéria. Beaucoup venaient encore d’autres pays d’Afrique sub-saharienne (Guinée, Côte d’Ivoire, Mali, Tchad et Gambie), de la corne de l’Afrique, en particulier d’Érythrée, ainsi que de Syrie et d’autres pays du Moyen-Orient. Ils fuyaient la guerre, la torture, la conscription, le travail forcé, les violations massives des droits de l’homme, les discriminations fondées sur leur sexualité, la violence, les persécutions, l’extrême pauvreté et le dénuement.
D’après les témoignages recueillis par nos équipes, les hommes, les femmes et, de plus en plus, les enfants non accompagnés qui transitent par la Libye ou y vivent subissent des violences extrêmes infligées par les passeurs, groupes armés et individus qui exploitent à des fins lucratives le désespoir de ceux qui fuient les conflits, les persécutions ou la pauvreté. Parmi les abus, ils nous parlent de l’usage de la violence (y compris de la violence sexuelle), d’enlèvements, de détentions arbitraires dans des conditions inhumaines, de tortures et d’autres formes de sévices, d’exploitation financière et de travail forcé.
Quelles que soient les raisons qui motivent les candidats à la traversée, tous ceux qui sont poussés à embarquer sur un bateau surchargé et en mauvais état se sont exposés à un énorme risque. En 2016, le nombre de décès en Méditerranée centrale a dépassé celui des années précédentes, avec plus d’un mort pour 39 survivants. Malgré ces chiffres choquants, l’Europe a poursuivi dans sa logique dissuasive. Au lieu de s’employer à sauver des vies et à offrir à ceux qui fuient la Libye une voie d’entrée sûre et légale dans l’UE, les autorités ont décidé de cibler les passeurs et de rejeter la responsabilité sur des pays situés loin des côtes européennes. Cette approche n’a fait qu’accroître le nombre de morts en forçant les passeurs à changer de tactique et à opérer d’une façon encore plus dangereuse pour éviter les patrouilles. En 2016, les opérations de recherches et sauvetage se sont une nouvelle fois avérées vitales en sauvant d’une mort presque certaine des milliers de personnes. Mais, elles ne sont qu’un simple pansement sur une jambe de bois.
* Chiffre tiré du projet sur les migrants disparus de l’Organisation internationale pour les migrations (IOM Missing Migrants Project)